AUGUSTES PEDALES 2013 / COMPTE-RENDU ILLUSTRE
Cet entassement de meubles de Marion Derrien fut réalisé avec le concours d'Emmaus Hédé, du Val d'Ille et des bénévoles de la Station-Théâtre.
Samedi matin, le poète Dominique Cagnard répèta Les Cagnards disent avec Gwenael De Boodt qui, dans l'après-midi, lira debout sur les tables parmi le chaland de la braderie vélo de Melesse des extraits des Bienfaits de la vélocipédie puis de Voici des ailes de Maurice Leblanc, édités au Pas de Côté.
Le soir, à l'issue de la lecture publique d'une liasse d'inédits de l'irradiant Dominique Cagnard ainsi que de l'intégralité de ses recueils de poèmes Une vache dans ma chambre (Motus)et Tsigane, je veux être ton papillon (Corps Puce), Gwenael se décoiffa du candélabre dont le 'patacycliste Yvan Gauzy l'avait chaudement couronné la veille au soir.
Dimanche, Le ciel s'étant dégagé, le public fut à plusieurs reprises pédestrement conduit par Marion Derrien et invité à s'allonger sur la route départementale afin de soustraire au goudron un peu de cette chaleur tellement accaparée par les moteurs automobiles que les petits corps piétons si fragiles en ont d'ordinaire de multiples frissons. Les dépouilles ainsi marquées au sol témoignèrent jusqu'au soir du génocide de l'espèce humaine par la machine à explosion.
Puis Dominique Cagnard éparpilla dans la cour du théâtre cent mille poèmes tirés de ses valises pour un Cagnard exquis mêlant Verhaeren à Tagore et Pirotte à Dumortier dans un orchestre si miraculeux qu'il se déporta de nouveau sur la chaussée, réenchantant le temps d'un poème à trente voix le monde univoque de la vitesse et du moteur.
Entre deux routes, dans les cimes des arpèges, un technicien mangeait des notes, pris de stoïques vertiges. Pierre Thiesset, éditeur du Pas de côté, journaliste et cycliste, remporta une étape, le jaune au corps, dans Les bienfaits de la vélocipédie, dont Voici des ailes qui firent prendre au public de vertigineuses ascensions littéraires.
Si la vache du poète ruminait dans sa chambre, ce n'était pas le cas des autos qui continuaient à prendre la route, soufflant de noires haleines par leurs naseaux en de fumants échappements. Matador des motos et autoréador, le directeur du théâtre en talons hauts se jeta dans l'arène en Roi du macadam qui fait cale en bourg. "Olé!" reprenait la foule dont la vie fut plus tard estimée par le Maire avoir été mise en danger ce dimanche.
Puis le public combla la salle qu'Yvan Gauzy 'patacrobate, en bon cycliste de ses trois Conférences sans cirque mais clownesques pédalant à merveille dans l'imaginaire de ses spectateurs, combla d'aise. On le vit ensuite fort auguste et d'un habile pli de son coude provoquer la béance des bouches d'un duo de hautes personnalités du théâtre dont on espère qu'elles reviendront sans tarder prendre ici la scène.
A la sortie du spectacle, d'augustes nuages pédalaient en peloton dans le ciel, marquant de larges voies célestes à l'avenir de la bicyclette tandis qu'au sol un journal imprimait dans ses colonnes et dans la semaine qui suivait que le tout s'était déroulé "en toute sécurité pour les automobilistes".